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Résistance 6/101 : vos voix

[texte publié initialement sur fb le 21 avril 2020]

Depuis le début du confinement, je me suis remise à écouter la radio. J’ai toujours été une grande amateure de radio, mais je trouve ces temps-ci un grand réconfort dans le fait de me faire raconter des choses à l’oreille. Comme si toutes ces voix me permettaient de continuer de percevoir la toile, le tricotage des fils tendus entre-nous. Tous les prétextes sont bons pour m’accrocher le sensible à d’autres voix. Les voix poétiques sont nombreuses : on peut écouter Noémie Pomerleau-Cloutier, Jérémie Tholomé, David Giannoni Peretti, Moe Clark, Les P’tites nuits de la poésie, Le tremplin d’actualisation de poésie, #PoétisezChezVous ou Les VOIX de la poésie… Il y a aussi une panoplie d’autres voix en tous genres et formats, j’affectionne particulièrement le « Journal de confinement » de Wouajdi Mouawad, le podcast de l’émission « C’est fou » de Serge Bouchard et Jean-Philippe Pleau, la série « Signal nocturne » de la Fabrique culturelle et l’initiative d’Anne-Lise Remacle « La bibliothèque des confins ». Mon coup de cœur ultime va au podcast « Confinés, mais ensemble » réalisé par Marie-Michèle Giguère et Cédric Chabuel. Une courtepointe de récits intimes de confinement, des histoires toutes uniques, bricolées dans l’urgence et dans l’émotion. La série nous permet de rencontrer une diversité de personnes et d’envisager ce que nous vivons selon le prisme de perspectives et de réalités diverses. Extrêmement touchant et rempli d’humanité(s).

https://ici.radio-canada.ca/tele/doc-humanite/site/episodes/483445/pandemie-coronavirus-confinement-isolement-liberte

Image mise en avant tirée du journal de confinement de Wouajdi Mouawad sur le site SoundCloud https://soundcloud.com/user-308301388/journal-dun-confinement-jour-0

Vidéo teaser pour le documentaire « 2 mètres » de Sophie Lambert https://ici.radio-canada.ca/tele/doc-humanite/site/episodes/483445/pandemie-coronavirus-confinement-isolement-liberte

Décalée, difficile, différence et diversité en vrac

Lorsque tu es née Mathilde, j’ai passé 10 jours dans la maison chez grand-maman. 10 jours à regarder la vie par la fenêtre. Je me sentais submergée. J’avais littéralement l’impression que la vie se passait ailleurs, sans moi. J’étais complètement bouleversée et je trouvais étrange de voir les gens continuer d’aller travailler le matin comme si de rien n’était. Je me sentais décalée, mais bien sûr, ça ne changeait rien au quotidien des voisins et à la marche générale du monde. J’étais dans un aquarium.

Parce que c’est difficile parfois d’être maman.

Je sais que je demeure privilégiée et que nous sommes à une époque où, non seulement c’est plus facile d’être mère tout court, mais mère monoparentale en particulier. Nous habitons aussi un lieu où il est plus facile d’être parent semble-t-il. Ce n’est pas partout où l’état contribue à minimiser les iniquités avec des politiques familiales, pas partout les congés de maternité, pas partout les garderies à 7$… Le visage de la maternité change selon les époques et les espaces et il est multiple dans un même espace et à une époque donnée. Quand on se compare on se console qu’i disent, mais je revendique malgré tout le droit de ventiler et d’affirmer que malgré que ma maternité soit merveilleuse, elle est aussi (dans une même journée et à tous les jours) chaotique. Alternances d’amour et d’aboiements.

C’est difficile et quand j’entends mon amie Isabelle me dire que notre situation particulière (de foyer monoparental) est lourde, j’ai automatiquement un boulet dans le fond de la gorge et j’ai envie de me mettre en boule dans un coin pour pleurer ou oui, être bercée. Il y a des moments creux et certains passages à vide. Les 6 premier mois et le manque de sommeil, les périodes de crises et de confrontation. Je me souviens de la légèreté retrouvée lorsque j’ai réalisé que j’étais finalement passée à travers le sprint des premiers mois, suivi du vertige de comprendre que ma vie se transformait en marathon, que la course n’était pas finie et que j’avais devant moi toutes sortes d’autres défis. Ces défis ne sont pas sportifs, mais me demandent d’être en forme et de puiser encore dans toutes mes ressources. Pas toujours l’impression d’être capable d’y arriver. Se sentir mal outillée, vieille, fatiguée par moments et finalement, comme dans un marathon… retomber sur ses pieds, être toujours capable, avoir du rebond. Roller coaster du fou. Continuer la lecture de Décalée, difficile, différence et diversité en vrac