Se faire une opinion tranquillement…

Avertissement, ce texte est décousu…

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Je devrais te parler d’acoustique musicale, c’est le cours dans lequel je suis inscrite en ce moment. Un cours qui fait saigner du nez, littéralement. J’entends de moins en moins mon cerveau se recroqueviller sur lui-même chaque mardi après-midi, alors qu’il est question d’impédance, d’intensité… de résistance. Je devrais t’en parler et surtout, je devrais être en train de l’étudier, puisque j’ai un examen la semaine prochaine. Mais, je procrastine et je lis cet article passionnant sur l’éditorialisation, écrit par mon futur directeur (non-j’ai-pas-encore-envoyé-le-formulaire) de projet. Parce que je suis gentille, je vais te glisser ici quelques extraits pour te donner le goût d’aller lire l’article au complet. Désolé… c’est en anglais!

En fait, la question qui m’intéresse particulièrement est celle de la « représentation » versus le « performatif ». Est-ce que l’écriture n’est vouée, pour toujours, qu’à représenter-nommer le monde (être une pâle copie, morte, du monde) ou peut-elle participer à le créer, à l’élaborer sur un mode plus performatif? Dans l’article en question il y a des pistes de réflexion. Dans l’introduction, l’auteur rapporte la critique de Paul Valéry face à la philosophie et de manière plus générale, à l’écriture.

This critique of philosophy is, more generally, a critic of any form of writing: writing means making still what is moving. Written words are frozen frames, inert corpses that only represent the moving bodies that populate reality. Valéry aspired to be a writer of movement, an architect more than a writer.

Behind this forceful critique of philosophy and writing in general lies a more global critique of the representational paradigm: representations are only imitations of reality, but these imitations are frozen frames of moving life, and therefore useless and fake.

The question that I want to take up in this paper is whether digital writing can be described in the same way. This is an important consideration because digital technologies are in fact based on writing. The web is constructed by writing. Everything on it is written – including images and videos, which are expressions of code and exist only as strings of characters. Writing is the actual material of digital space. But what kind of writing is the writing of digital space? Is it different from the kind of writing that is criticized by Valéry? And what is the relationship between writing and philosophy in the digital age?

L’article démontre ensuite comment l’espace numérique est un espace réel. Dans cet espace « digital », notamment sur Internet, l’écriture occupe une place prépondérante. Enfin, l’auteur fait la démonstration que l’espace numérique opère dans le paradigme d’un mode « performatif » (avec définition à l’appui). Selon lui, l’espace numérique n’est pas une représentation du réel, mais une façon singulière de produire et d’organiser la réalité (je simplifie).

Honnêtement, je ne demande qu’à être convaincue, mais j’imagine que ma conception de l’écriture « résiste » aussi ici. Je conviens que le web est (THE!) l’espace d’écriture par excellence, que ce qui s’y passe, même les images et les sons, sont du code, donc de l’écriture. Je trouve franchement poétique l’idée de l’éditeur-architecte et de l’espace qui se construit à travers différentes  connexions, à la manière d’une trame, avec une hiérarchisation (quand même) des éléments qui la composent. Cet échafaudage d’écriture me fait (re)penser à certaines images du film The Matrix, où les 0 et les 1 finissent par se matérialiser. Ça me renvoie aussi au film vu dernièrement La Sapienza d’Eugène Green, qui met en lumière le travail de l’architecte baroque Francesco Borromini.

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Les fleurs à -40

OLYMPUS DIGITAL CAMERASaint-Valentin frileuse. Un homme marche rapidement avec une douzaine de roses dans les mains. De quoi auront l’air les fleurs une fois à la maison? C’est beau d’être optimiste, mais… Ça me rappelle la fois où je courais avec une bouture fraîchement empotée vers l’autobus dans un froid glacial. La plante se flétrissait avant même que j’aie fait un coin de rue. Je courais, paniquée, avec la plante dans mon manteau en lui parlant. Une autre de ces fois où j’ai eu l’air débile dans un lieu public. La plante est toujours chez moi et se porte mieux que jamais. Ça a l’air que la vie est plus forte que la mort… mais à la fin tout meurt quand même… #resistance-jovialiste

Les premiers hivers

P1010214_webC’était mardi entre Noël et le Jour de l’An, non?… en nous levant nous avons découvert une épaisse couche de neige de notre fenêtre. C’était juste après avoir lu un article du Devoir publié sur le fil d’actualités FB d’un ami. Dans l’article en question, on établit un rapport entre l’amour de l’hiver et le degré de québécité…

« Peut-on en vouloir à des hommes qui ont souffert de l’hiver de vouloir le mettre à distance pour la suite de leur vie ? À en croire Louis-Edmond Hamelin, penseur de la nordicité, ce sont surtout les jeunes qui aiment aujourd’hui l’hiver. Ce serait à peu près 35 % de la population qui accepte l’hiver. Au médecin et écrivain Jean Désy, Hamelin expliquait par ailleurs que cette portion de la population lui apparaît comme des « gens près de leur pays, car, en réalité, accepter l’hiver, c’est accepter la québécité. Ce n’est pas une fantaisie, l’hiver ; c’est une réalité, un objet qui est là de façon récurrente chaque année. Quelqu’un qui aime l’hiver a, à mon avis, un degré de québécité plus élevé que celui qui passe son temps à le détester. »
– Jean-François Nadeau

Bon…. toujours au chaud, je me disais que moi… ben… oui… j’ose le dire… j’aime pas l’hiver! Ou plutôt, je lui préfère l’été, l’automne et le printemps. Je sais que c’est impensable de dire une chose pareille. C’est comme d’avouer qu’on n’aime pas Proust à des littéraires (j’aime pas Proust!). À la limite, une telle affirmation est pardonnée à de nouveaux arrivants, mais si t’es né ici, nécessairement la tolérance au froid fait partie de ton ADN. Ben oui… mais non!
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Nos identités déambulatoires

100_1032Est-ce qu’on peut aller au-delà de la question de l’identité? Est-ce que nos choix, nos actions, nos doutes, nos questionnements peuvent vraiment se dissocier de cette question fondamentale : « qui suis-je »? Bien sûr, comme l’identité est mouvante, aussitôt qu’on s’approche d’un semblant de réponse, c’est qu’on est déjà ailleurs, autre. Aussi, la situation particulière du Québec, composé de deux solitudes et d’un « peuple invisible » n’est probablement pas étrangère au fait de se sentir soi-même une mosaïque complexe et fragmentée d’identités plurielles plus ou moins avouées. C’est-tu juste moi?
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Les matins gris

petite main dans l'ombre
photo prise par un participant du projet collectif UNE BOUTEILLE VERS LES ÉTOILES

Cet « épisode » est arrivé à l’automne l’an dernier et aujourd’hui j’y (re)pense…

Je me promenais avec Mathilde en poussette sous la pluie. Le genre de journée grise où tu marches parce que t’as l’impression que marcher est la seule façon de chasser les nuages. À chaque pas tu respires un peu mieux, tu es un peu plus présente, là là là. C’est ce qui te préoccupes ces temps-ci : la présence. C’est vrai que tu es très peu présente pour les autres et très peu présente à toi-même dans ce brouhaha urbain-médiatique-familial-de travail. Je crois même m’être plainte de l’absence de gens proches dernièrement et l’ironie du sort s’est chargée de me rappeler que je suis moi-même très peu disponible pour qui que ce soit. On m’invitait à prendre un thé que je n’ai jamais trouvé le temps de siroter. Je ne trouve pas le temps d’aller me faire couper les cheveux, tsé.

En descendant la rue, des fleurs partout. Les gens ont pris le temps de cultiver les carrés de terre autour des arbres. L’impression d’être au jardin botanique ou dans une ruelle verte. On décide de prendre l’autobus au moment où la pluie s’intensifie. Dans l’autobus un homme lit Milan Kundera – l’insoutenable légèreté de l’être – un garçon regarde avec envie le plat de céréales de Mathilde – nous sommes tassés comme des sardines humides. Il y a un homme habillé avec un sac de vidange, imperméable de fortune et une dame noire qui porte un tailleur vert émeraude.
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Les lettres d’amour comment les rédiger

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« Les femmes écrivent plus volontiers que les hommes. Mais, bien souvent, hommes ou femmes ont une certaine timidité qui les inhibe et les met dans l’embarras pour trouver des mots suffisamment convaincants et des images assez poétiques pour exprimer de façon émouvante leurs sentiments profonds.

Bien que nous ne tenions pas toujours à le montrer, nous sommes néanmoins fort sensibles au langage du coeur. C’est pourquoi l’auteur d’une belle lettre d’amour, vibrante et passionnée, est assuré, encore aujourd’hui, d’exciter l’imagination du destinataire et d’en être récompensé. »

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« La lettre de déclaration
Elle s’envoie après une rencontre chez des amis, dans un bal, ou après un premier contact par l’agence matrimoniale [lire date Tinder!] ou par un club. Dans une lettre de ce type, une certaine naïveté, un rien de poésie, de l’enthousiasme, même timide, sont toujours bienvenus. Ne craignez pas d’être parfois un peu ridicule, c’est toujours émouvant pour le destinataire.

Mon cher… (ou ma chère…)
Pardonnez-moi cette familiarité, je ne peux m’empêcher de vous appeler par votre prénom, c’est un peu comme si nous nous connaissions déjà depuis longtemps! Et puis je trouve qu’il vous va si bien! Mais on vous l’a sûrement déjà dit En tous cas, pour moi, vous ne pouviez certainement pas en porter un autre!
En vous rencontrant pour la première fois l’autre jour (citez le nom et l’endroit), j’ai eu tout de suite l’impression de ne voir que vous, et je dois avouer que j’ai senti battre mon coeur comme un gosse et, étant plutôt timide, je n’ai pas dû vous paraître bien malin. Ne m’en veuillez pas, j’aurais vouloir mieux vous parler, mais vous m’avez beaucoup impressionné. Par lettre, c’est déjà un peu plus facile, encore que j’aimerais tant savoir vous dire tout ce que je ressens de façon plus élégante. […] »
(Nicole Clement, Edition De Vecchi 1977)

Blanc

Une nouvelle série de fragments »CORRESPONDANCES ET CONVERSATIONS« . Cette conversation a été entendue au Café Babylone, un jour où je me suis fait poser un lapin. Je suis entrée dans le café, en beau maudit et j’ai commandé une pinte de noire. À côté de moi un jeune homme venait de perdre la femme se vie et discutait avec une amie. Le mot « cancer » a été prononcé. Cette conversation s’est superposée à d’autres, antérieures. Des conversations entre moi et Sophie à propos de sa mère, entre moi et ma mère à propos de Ghislaine…

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inconnus au Café Babylone…
– Sinon, les gens ils sont maladroits, ils ne savent pas quoi dire, non? Du coup, le malade doit les rassurer et les convaincre que ça va et que la vie continue. La personne prend une partie de son énergie pour ça. Pour que les autres aillent mieux. Et c’est pour ça que tout n’est pas dit. On ne veut pas inquiéter l’entourage, on ne veut pas voir la famille si soucieuse. On ne veut pas parce qu’on n’a plus l’énergie pour écouter la peine de tous ces gens. Oui, ils ont mal eux aussi, ils veulent juste que ça soit comme avant, mais c’est pas possible. Et le malade le sait. Le malade sait qu’il est malade, il sait qu’il a mal, il sait qu’il va mourir. Mais il se bat et pour combattre il doit croire qu’il peut vaincre. L’instinct de survie est très très fort.

– Tout le monde connaît quelqu’un qui connaît quelqu’un qui est mort d’un cancer. Il y a un très beau film à ce sujet. Bon, c’est peut-être pas le moment de le voir, mais c’est un très beau film.

Métropolitain encadré

Depuis que je travaille sur le projet PARCOURS GÉOPOÉTIQUE SAINT-MICHEL, étrangement, j’ai appris à apprivoiser le boulevard métropolitain. J’ai commencé en flânant sous ce dernier, entre les rues Papineau et Saint-Michel. Au départ, comme tout le monde, je ne voyais qu’une cicatrice, une cassure, une censure du paysage. C’est bruyant, c’est poussiéreux, c’est sûr. Mais j’y ai découvert, l’hiver, un endroit protégé du froid. Je m’y réfugiais pour marcher et j’ai commencé à y prendre des photos et des captations sonores. Les lumières, les lignes, les bruits du trafic, qui s’apparentent aux bruits de l’océan lorsqu’on ferme les yeux. Les oiseaux qui nichent dans le coin d’Iberville, les trombes d’eau qui débordent en chutes lorsqu’il y a pluie. Autant de surprises qui font de l’autoroute un personnage du quartier. Un personnage en mouvement. Je me suis surprise à déambuler avec plaisir sur cette frontière, qui coupe le quartier en deux et délimite le nord et le sud. Une porte d’entrée vers d’innombrables découvertes, cette impression d’être funambule sur le fil des souvenirs et des espaces. Au sud : la bibliothèque-piano, les accents du Maghreb, la caverne d’Ali Babaroque du Marché aux puces. Au nord : le centre environnemental, les gourmandises de la rue Charland, les phares comme la TOHU et la Maison d’Haïti. Partout des ruelles vertes, une toponymie avec une mémoire, des communautés culturelles multiples, une vie communautaire active, la culture qui prend l’air, des familles, des entrepreneurs, des aînés, des rêveurs…

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pré[textes] artistiques et autres produits dérivés poétiques